Lutte contre la gabegie et fin de l’impunité : Des menaces, en attendant

Le Calame – Les Mauritaniens assistent depuis peu à la multiplication des sorties du président de la République. Il effectue des visites inopinées sur des chantiers et des établissements publics et a récemment présidé une réunion des cadres du ministère de la Santé.

Au cours de cette rencontre, il a insisté sur l’absentéisme récurrent des employés des établissements sanitaires, déploré l’insalubrité de ceux-ci et est apparu très fâché et remonté. Dans la foulée, le directeur du centre hospitalier national a été débarqué sans qu’on en ait la moindre explication. Les problèmes évoqués par le Président lors de sa rencontre au Palais des congrès auraient-ils fondé sa décision de limoger le docteur Hamahoullah ould Cheikh ?

Quelques jours auparavant, le Raïs s’était rendu sur les installations du projet Aftout ech-Chargui pour y examiner le problème d’approvisionnement en eau que venait de subir Nouakchott. On y a appris avec lui que les infrastructures de cet important projet n’avaient pas connu d’entretien, des années durant.

Inadmissible et intolérable ! Il s’en est suivi le limogeage du DG de la SNDE et de son adjoint. Les Mauritaniens ont commencé à applaudir. Puis les responsables de cette société à Nouadhibou –notre capitale économique qui traîne, soixante ans encore après l’Indépendance, de récurrentes pénuries d’eau –étaient relevés de leur fonction : des milliers de mètres cubes d’eau auraient été détournés, a-t-on appris. Tout cela autour d’une seule société publique ! On entend bien que le président de la République en exige un audit soigné.

Il ne doit pas s’arrêter en si bon chemin… si la démarche se veut cohérente et crédible. D’autres sociétés d’État doivent passer à la trappe : elles sont très mal gérées, leurs marchés distribués à tour de bras par des marchés de gré à gré, népotisme aidant, et chantiers contrôlés avec complaisance.

« Les retards et le détournement des deniers publics ne sont plus acceptables », a martelé notre Président : Les Mauritaniens doivent le prendre au mot et en attendre de pied ferme la suite. Ils ne se contenteront pas d’une opération de charme en guise de communication de précampagne.

Mais jusqu’où est-il prêt à aller ? Les rapaces du système le laisseront-il assainir la vie publique, après avoir réussi à amadouer une partie de l’opposition démocratique ?Tâche très ardue, on l’imagine bien ; risquée peut-être, à quelques mois de la prochaine présidentielle.

C’est pourtant, aux yeux des observateurs, le meilleur moment pour assainir la gestion de notre administration. Après avoir donné l’impression que la lutte contre la gabegie allait être l’axe central de son mandat et bien la démarrer avec un signal très fort – le feu vert donné à la commission d’enquête parlementaire de 2020 sur la décennie de son prédécesseur –Ghazwani aura patienté quatre ans avant de se lancer personnellement dans la bataille.

Une Première dans le pays dont l’éventualité du démarrage laissait –laisse encore ? – bon nombre d’observateurs sceptiques, tant l’administration et mêmes d’autres corps étaient minés par la corruption galopante…

L’impunité en règle

Les signes ostentatoires de richesses mal acquises crevaient les yeux des oubliés et marginalisés de notre république. Chaque individu nommé à un poste de responsabilité ne se préoccupe, en premier chef, que de comment s’enrichir.

Le voilà à réhabiliter des locaux, ouvrir de nouveaux chantiers, changer de fournisseurs, de voitures puis de maison et même de look et parfum…Les voleurs renvoyés de leur poste en venaient jusqu’à fêter leur sortie, leur traversée du désert étant donnée pour courte. Aucun – sinon peu de – remboursement des fonds détournés.

C’est d’ailleurs précisément cette règle de l’impunité que le président Ghazwani doit faire abolir par une loi au Parlement, bannissant à jamais de toute fonction de responsabilité les auteurs de détournements de deniers publics et leurs complices et confisquant les biens des uns et des autres.

C’est le seul moyen de dissuader ces hommes et femmes de sucer le pays alors que la majorité de leurs concitoyens luttent pour la survie, chaque jour que Dieu fait. Aujourd’hui, les Mauritaniens sont suspendus à la suite du feuilleton « Lutte contre la gabegie, délinquance financière et impunité ». Les partis politiques doivent accompagner cette croisade, en évitant de mettre des peaux de banane sous les pieds du Raïs…

si tant est qu’il persévère à mener à terme cette opération « Mains propres ». Pour ce faire, il doit réactiver les leviers que sont la Cour des comptes et l’Inspection générale de l’État, quasi-coquilles vides depuis quatre ans. On éprouve l’impression qu’elles n’ont pas la latitude de mener leurs contrôles, certains fonctionnaires et chefs d’entreprise paraissant intouchables.

Mais on ne peut pas mener un combat contre la gabegie dans un pays où les structures de contrôle ne sont pas autonomes. Les rendre à leur impartialité paraît certes difficile, tant elles baignent dans un environnement infesté de corrupteurs et de corrompus aguerris. Prions donc Allah de préserver la Mauritanie de ses requins et rapaces !

Dalay Lam

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