Affaire Ghosn: perquisition à Tokyo, interpellations en Turquie

Une perquisition a eu lieu jeudi au domicile provisoire de Carlos Ghosn à Tokyo et plusieurs personnes ont été interpellées en Turquie, où une enquête est ouverte pour comprendre comment l’ex-patron a réussi à s’enfuir au Liban en passant par Istanbul.

Carlos Ghosn est soupçonné par les procureurs japonais d’avoir utilisé à son arrivée un deuxième passeport français en sa possession.

Les télévisions nippones ont montré jeudi des images d’inspecteurs entrant dans la maison de Tokyo habitée par l’ancien patron de Renault et Nissan jusqu’à sa mystérieuse fuite.

En outre, les autorités turques ont interpellé jeudi plusieurs personnes dans le cadre d’investigations sur son transit par Istanbul.

L’ex-PDG se trouve depuis lundi à Beyrouth, d’où il a émis un communiqué. Une conférence de presse doit avoir lieu dans les jours à venir dans la capitale libanaise, a confirmé jeudi à l’AFP l’équipe de communication de l’ancien magnat de l’automobile.

Les circonstances de son départ surprise sont encore très floues et les officiers du bureau des procureurs de Tokyo vont exploiter toutes les données disponibles, dont les images de la caméra de surveillance placée à l’entrée de son domicile et celles des caméras du quartier, selon des informations livrées aux médias locaux par des « personnes en relation avec l’enquête ».

Carlos Ghosn, qui possède trois nationalités -française, brésilienne et libanaise- ne sera pas extradé s’il vient en France parce que la France n’extrade « jamais » ses nationaux, a par ailleurs affirmé jeudi la secrétaire d’Etat française à l’Economie, Agnès Pannier-Runacher, sur la chaîne BFMTV.

Par ailleurs, une source proche du dossier a confirmé jeudi à l’AFP que M. Ghosn avait non pas un mais deux passeports français, dont un sur lui.

– Pas de Carlos Ghosn enregistré –

Selon la source contactée par l’AFP, trois passeports (un français, un libanais et un brésilien) sont conservés par ses avocats dans un coffre, mais une autorisation exceptionnelle du tribunal lui permettait d’avoir sur lui ce deuxième passeport français, enfermé dans une sorte d’étui (boîte ou sacoche, le type n’est pas précisé) qui restait en sa possession mais dont la clef (un code secret) était également détenue par ses avocats.

Ce document lui tenait lieu de visa de court séjour dans l’archipel et il devait donc l’avoir à portée de main pour ses déplacements internes, a expliqué la même personne.

M. Ghosn n’avait pas le droit d’aller à l’étranger, mais il vivait relativement libre de ses mouvements à l’intérieur du Japon, moyennant quelques restrictions de durée de séjour hors de la capitale.

Cette disposition légale est valable aussi pour d’autres personnes étrangères en liberté conditionnelle dans l’archipel, a souligné la source.

En cas de contrôle, il devait contacter l’avocat détenteur du code pour que celui-ci se déplace (il ne pouvait se contenter de donner le code par téléphone à un policier), selon la même source.

Ce passeport, M. Ghosn ne l’a pas utilisé pour partir, car les autorités japonaises n’ont pas de données informatiques indiquant qu’il se serait présenté sous sa réelle identité aux contrôles aux frontières du Japon avant son départ, dans aucun des aéroports du pays.

Il est donc soupçonné d’avoir employé un « moyen illégal » de sortie du territoire (sous une autre identité ou en échappant aux contrôles), souligne la chaîne publique de télévision NHK citant des sources proches des enquêteurs.

Par hypothèse, il aurait pu se trouver dans des bagages non passés aux rayons X, ce qui est possible dans le cas d’un avion privé, ou avoir bénéficié d’une aide diplomatique pour éviter les contrôles habituels, expliquent des médias nippons.

Au Japon, les contrôles d’entrée et sortie du territoire sont toutes enregistrées dans un système informatique, avec qui plus est prise de photo et empreintes digitales pour les étrangers.

En revanche, ce deuxième passeport français aurait pu être sorti de force de son étui et présenté à son arrivée pour les formalités habituelles.

Selon une source à la présidence libanaise, le patron déchu est entré dans le pays, en provenance de Turquie, avec un passeport français et sa carte d’identité libanaise.

En outre, pour sa fuite, M. Ghosn est soupçonné d’avoir emprunté un jet privé parti de l’aéroport du Kansai (ouest).

Un petit avion de ce type a décollé le 29 décembre vers 23H00 (heure locale) de cette infrastructure cogérée par les groupes français Vinci et japonais Orix, en direction d’Istanbul, ont indiqué les médias locaux.

La fuite de M. Ghosn a provoqué la consternation au Japon où il était jusqu’à son arrestation en novembre 2018 qualifié de « patron charismatique sauveur de Nissan » même si son aura avait pâli ces dernières années. Son départ illégal a aussi sidéré son équipe de défense qui juge cette attitude « inexcusable », même si elle dit comprendre les raisons de son mécontentement vis-à-vis de la justice japonaise.

AFP

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