Retard et mauvaise qualité des chantiers : Ghazouani hausse le ton
Le Calame – Lors de sa réunion, il y a quelques semaines, avec les secrétaires généraux des ministères, le président de la République annonçait qu’il ne tolèrerait plus de retard dans l’exécution des chantiers. Il entend tenir ses engagements électoraux de 2019, communément appelés Taahoudaaty.
Le ton était ferme pour ne pas dire menaçant. Une sortie appréciée des citoyens, premières victimes du laxisme de l’Administration à qui le président demande de se rapprocher de ceux-là et de se mettre effectivement à leur service.
Le vendredi 8 Septembre, le Raïs en a remis une couche, à l’occasion de visites sur trois chantiers en construction à Nouakchott. Réitéré ses exigences et ses menaces, il a exigé « de prendre, sans délai, les mesures qui s’imposent pour traiter chaque cas séparément » dans les trois projets en cause ; puis appelé au respect des normes de qualité spécifiées et des délais, excluant toute manipulation de ceux-ci.
« De tels comportements ne seront plus acceptés », a-t-il tonné, « il n’est plus admissible que des chantiers traînent en longueur. ». Voilà ce qui est bien dit. Reste la suite.
C’est la énième fois qu’on entend du gouvernement ces menaces, mais aucune sanction n’a été à ce jour prise, exceptée celle qui visa le directeur de la SNDE et son adjoint à qui il est reproché des négligences manifestes dans l’entretien des installations de l’Aftout Es-Sahli.
Ce qui a entrainé des problèmes d’approvisionnement en eau de Nouakchott. Il n’est un secret pour personne – à commencer par le président de la République – que les « responsables » mauritaniens ne se préoccupent des chantiers qu’en ce que ceux-ci peuvent leur rapporter des dividendes (commissions).
Leurs visites (in)opinées sur les sites ne servent qu’à la vitrine :la radio et la télévision encensent ces déplacements, tandis qu’informés à l’avance, ceux qui exécutent les chantiers se partagent avec leurs hôtes de petit bénéfices immédiats :frais de déplacement, carburant, locations de voitures, tentes, chaises, fauteuils et autres collations…L’essentiel est passé en pertes et profits.
Travaux bâclés
Les chantiers exécutés à Nouakchott accusent non seulement du retard – échangeurs Hay Sakine et Carrefour Bamako, par exemple – mais également la qualité des ouvrages laisse ordinairement à désirer. Les automobilistes de notre capitale ne cessent de constater le bâclage de travaux qui se dégradent en moins de deux.
Ce n’est qu’en Mauritanie qu’on peut voir un goudron se dissoudre sous une eau de pluie. Dans son dernier édito, le directeur du Calame rapportait les premières fissures sur le bitume du tronçon Boutilimit –Aleg (cent kilomètres). Retard et piètre qualité des résultats, là encore et comme ailleurs.
Nos entreprises sont passées maîtres en triche ; pis, ils réussissent à décrocher des avenants, avec la complicité des départements de tutelle et des bureaux de contrôle.
L’État est devenu la vache à lait à traire jusqu’à la dernière goutte. On s’en fout que son veau en périsse ! Telle est notre triste réalité et ce n’est un secret pour personne, à commencer par les ministres et leurs secrétaires généraux…
Quelques heures de visites et autres menaces du président de la République ne suffisent plus : il faut qu’il aille au-delà, il doit sévir. Ira-t-il jusque-là ? Une chose est cependant sûre : ministres, secrétaires généraux, chefs d’agence et de projets sont nommés pour leur tribu, leurs clients, l’agrément de tel ou tel général.
De très hauts placés, tout près du président de la République. Autrement dit, tout un système… Si le président de la République veut combattre la gabegie, il faut qu’il punisse les prédateurs. Il les connaît tous ; sinon, à quoi servent les services de renseignements ? Il faut que des têtes tombent et avec elles leurs complices.
Comment peut-on encore assister à des célébrations de sorties de prison ou de cadres limogés pour faute lourde ? Parce que l’on sait qu’ils ne vont pas tarder à être rappelés. Le recyclage est ici érigé en règle.
Chaque année, des milliards sont injectés dans des infrastructures ; chaque jour que Dieu fait, on voit des chantiers pousser, des réhabilitations s’effectuer.
Le budget de l’État a connu une augmentation fulgurante… alors que tant de citoyens mauritaniens peinent à joindre les deux bouts ! Certains s’enrichissent de manière éhontée, d’autres crèvent de faim. Le premier mandat du Rais devrait contribuer à réduire ce fossé mais, hélas, celui-ci ne fait que se creuser.
Dalay Lam
Source : Le Calame – Mauritanie