Vidéo. Mauritanie: hausse des droits de douane sur les légumes, voici les revendications des acteurs de la filière pour booster la production
Le360 Afrique – Les consommateurs mauritaniens sont confrontés à une hausse vertigineuse du prix des légumes depuis plusieurs semaines. Un phénomène imputable à une loi rectificative des finances visant à protéger une production locale en décalage avec les énormes besoins du marché, adoptée en août 2023.
Les ménages mauritaniens, particulièrement ceux de Nouakchott et de Nouadhibou où la consommation de légumes est relativement importante, sont durement touchés par la flambée des prix consécutive à la forte augmentation des droits de douane sur ces produits.
Une forte augmentation justifiée par le souci d’encourager la production maraîchère du pays dont les récoltes s’étalent sur la période janvier-avril de chaque année.
Seulement, la production locale, même durant cette courte période est faible et ne satisfait pas la demande nationale. Au meilleur des cas, celle-ci répond à peine à 20% de la demande du pays.
Du coup, les opérateurs du secteur de la production maraîchère préconisent, au lieu d’augmenter les taxes douanières et entrainer des tensions sur le marché dont les consommateurs sont les seules victimes, de mettre en place des mesures à même de booster la production nationale de légumes.
Ainsi, Omar Mbow, horticulteur et spécialiste du maraîchage, présente les différentes variétés de légumes cultivées au niveau de sa parcelle de 2 hectares située à 17 km au sud de Nouakchott sur la route de Rosso. Il s’agit essentiellement des carottes, navets, oignons, choux… Il liste les multiples obstacles que rencontrent les opérateurs du secteur et qui bloquent la production nationale de légumes. Il s’agit, entre autres, de l’accès à la propriété foncière, à l’eau dont la fourniture est soumise à de fréquentes coupures…
Ce spécialiste préconise une démarche plus stratégique à la place de la hausse des taxes sur les légumes importés en demandant à l’État de contribuer au développement de la filière, notamment au niveau de la vallée, le long de la frontière de 700 km où l’eau est disponible durant toute l’année.
«Nous travaillons dans la production de tous les légumes ici au PK 17 au sud de Nouakchott. Nous avons l’expertise et l’expérience nécessaires, mais nous sommes confrontés à des problèmes qui plombent les possibilités de production: l’accès à la terre, l’approvisionnement en eau et la faiblesse des moyens pour l’investissement», soutient également Houssein Ahmed, maraîcher.
Même son de cloche chez Hassan Ould Mohamed: «Nous faisons du maraîchage ici au PK 17 au sud de Nouakchott. Nos problèmes concernent l’accès à la terre, à l’eau et aux semences. Voilà les facteurs sur lesquels les autorités devraient miser pour atteindre l’autosuffisance en légumes, au lieu de mettre des taxes douanières sur les légumes importés, qui entrainent une hausse des prix au détriment des populations.»
En clair, les producteurs que l’État dit vouloir protéger trouvent que la véritable solution est ailleurs. Ils demandent à l’État d’encourager d’abord la production locale en mettant à la disposition des acteurs de la filière les moyens nécessaires, notamment la terre, l’eau et les financements afin de pouvoir acquérir les semences de qualité et les produits phytosanitaires.
Ce n’est qu’une fois ces aides accordées que l’offre nationale pourra connaître une hausse significative et se substituer petit à petit à une partie des importations. En dehors de cela, l’argument douanier, s’il contribue aux recettes douanières, réduit le pouvoir d’achat des ménages, particulièrement des couches populaires qui font face à la flambée des prix des légumes.
Par Amadou Seck (Nouakchott, correspondance)