Défections en cascade : L’APP Dans La Tourmente

– L’Alliance Populaire Progressiste (APP) vit une crise sans précédent ces derniers mois culminant avec une véritable saigne. Le parti de Messaoud ould Boulkheir, leader historique de la mouvance anti esclavagiste, ancien président de l’assemblée nationale vient d’enregistrer la défection d’une cinquantaine de cadres négro mauritaniens, les derniers sans doute de la barque APP.

Ces démissions en cascade qui jalonnent l’existence de l’APP interviennent un mois après celle des figures de proue de la formation nassériste, et à quelques mois de l’élection présidentielle de juin 2024. L’APP est dans la tourmente, suite à une saignée dans ses rangs.

C’est à travers un communiqué qu’une cinquantaine de cadres et militants originaires de la vallée du fleuve ont acté leur départ de l’une des formations historiques de l’opposition, pour protester contre sa nouvelle orientation «contraire au combat en faveur de la justice et de l’égalité de tous les mauritaniens », selon Ladji Traoré, ex-Secrétaire Général.

Pour le désormais ex Secrétaire Général, les raisons de ce départ massif de militants du parti sont liées à ‘’un phénomène lié à la violation des idéaux du parti et des textes régissant son fonctionnement. Ceux qui ont tourné le dos au parti protestent contre sa nouvelle orientation «contraire au combat en faveur de la justice et de l’égalité de tous les Mauritaniens».

Parmi les faits reprochés au parti « le rejet de l’idée de l’officialisation des langues nationales : peul, soninké et wolof, la discrimination récurrente au sein du parti, la gestion unilatérale, le choix arbitraire des candidats aux élections, le refus de dénoncer les pratiques néfastes de l’Agence Nationale du Registre des Populations et des Titres Sécurisés (ANRPTS), des divergences au sujet des terres dans la vallée du fleuve…. ».

Les personnalités démissionnaires sont Ladji Traoré, ancien Secrétaire Général, Sow Samba Ali, délégué au Congrès National, Touré Mamadou Daouda, ancien maire de Sebkha, Couro Amadou Bâ, première adjointe au maire de la commune d’El Mina, Sarr Mamadou, SG Section Riad, Diallo Cheikh Ahmed, Secrétaire Général Adjoint section El Mina, Bâ Kalidou, responsable DH section Arafat.

Messaoud pointe le manque de reconnaissance

Réagissant dans un premier temps, dans une interview à un hebdomadaire de la place, à la démission du Secrétaire général et une cinquantaine d’autres militants, la figure marquante « d’El Hor » mouvement pour l’émancipation des esclaves avait affirmé : « S’agissant du premier cité, mon commentaire est : Louange à ALLAH ! Puis Bon débarras et sans regrets !

Pour les autres signataires, bien que la liste est plus virtuelle que réelle, je regrette leur départ et je leur présente mes sincères excuses ; je demande pardon pour tout ce que je n’ai pas pu réaliser qui réponde à leurs attentes.

Ma conscience est cependant tranquille parce que je sers A.P.P. le mieux que je peux et que je n’ai jamais discriminé que mes enfants et mes parents, bien que convaincu 100% de fidélité’’,avait-il clamé.

Une semaine plus tard, Messaoud passe à l’offensive en musclant la débandade dans les rangs de son parti, dans une vidéo largement relaye sur la toile. Réfutant les arguments avancés par les partants, le leader de l’APP rappelle sa participation active au combat de la communauté négro africaine et la défense constante des droits de tous les mauritaniens victimes d’oppression et déplore l’absence de « reconnaissance » des cadres ressortissants de la vallée, contredisant au passage les raisons avancées par Ladji Traoré, ancien Secrétaire Général de l’APP, pour justifier les défections massives ayant touché les rangs du parti. Pour le dirigeant de l’APP, « les négros africains n’ont pas été reconnaissants envers lui-même et le mouvement Haratine ».

Ould Boulkheir souligne les efforts déployés par le parti pour porter leurs souffrances et défendre leurs droits. « Nous avons porté leur douleur et défendu leurs causes plus qu’ils ne l’ont fait eux-mêmes, et nous avons crié haut et fort les discriminations qu’ils ont subies », a-t-il avancé.

Dans sa déclaration, Messaoud a évoqué le passé de Ladji Traoré, affirmant qu’il est bien connu de tous et que le parti ne suit pas ses directives ni celles d’autres personnes. « Ce n’est pas lui qui nous a poussés à soulever les problèmes des Noirs ni à en parler », a précisé le président de l’APP.

Les démissionnaires ont entamé des consultations pour décider des suites à donner à leur mouvement qui intervient à quelques mois de l’élection présidentielle de juin 2024.

Ces tensions internes surviennent à un moment crucial pour l’APP, qui semble être secoué par des luttes de pouvoir et des divergences sur bien de questions nationales.

Démissions de deux figures emblématiques

En février dernier, le président du Conseil national de l’Alliance Populaire Progressiste (APP), Mohamed El Hafedh Ismaïl et le secrétaire général adjoint, Mohamed Val Mahmadi, avaient annoncé conjointement leur retrait du parti, affirmant toutefois leur attachement à tous les principes, objectifs et visions sur lesquels l’APP a été fondée.

Ancien président de l’APP, Ould Ismaïl avait été remplacé en 2003 par Messaoud ould Boulkheïr, lors de l’intégration du groupe des anciens de la dissoute Action Pour le Changement au sein du parti des nasséristes. Ould Ismaïl et Mohamed Val Mahmadi justifient leur décision « par les obstacles majeurs qui empêchent le parti d’aller de l’avant pour atteindre les objectifs tracés et qui ont fortement impacté le rendement de la formation politique ».

Les partants précisent dans leur communiqué que « le formidable travail réalisé sur la base d’un programme national axé sur des visions nationales éclairées bien négociées, lors de l’intégration en 2003 de forces nationales sérieuses et militantes, se heurte depuis des années à des difficultés internes […] qui ont conduit à un déclin de l’efficacité et du rôle du parti sur l’arène politique et l’ont rendu incapable de remplir le rôle pour lequel il fut fondé.

Ces obstacles résident principalement dans la manière dont les instances de haute direction du parti étaient gérées, sans que les grands efforts déployés par de nombreux dirigeants et militants du parti pour surmonter ces difficultés via les mécanismes des procédures partisanes ne parviennent malheureusement pas à rétablir les choses et d’atteindre l’objectif visé à travers les mécanismes du travail institutionnel du parti ».
Source:Eveil Hebdo-Mauritanie

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