Israël et la Turquie rétablissent leurs relations diplomatiques
Courrier International – L’État hébreu a annoncé mercredi le retour de leurs ambassadeurs dans les deux pays après leur “décision d’élever le niveau des liens à des relations diplomatiques pleines et entières”. Une manière pour Erdogan de réduire son isolement diplomatique et économique, estime la presse.
“Après une décennie en eaux troubles”, Tel-Aviv et Ankara ont décidé de “normaliser leurs relations”, constate le quotidien libanais L’Orient-Le Jour. Le Premier ministre israélien, Yaïr Lapid, a annoncé mercredi le retour des ambassadeurs et des consuls généraux dans les deux pays après la “décision d’élever le niveau des liens à des relations diplomatiques pleines et entières”.
Le chef de gouvernement de l’État hébreu, qui s’est entretenu au téléphone dans la soirée avec le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a déclaré que “le renforcement des relations” entre la Turquie et Israël allait “mener à de nombreuses réalisations, notamment dans les domaines touristiques et économiques”. Il a notamment précisé que les vols directs entre Israël et la Turquie allaient reprendre prochainement.
“Si elle est soudaine, la nouvelle n’est pourtant pas totalement surprenante”, remarque L’Orient-Le Jour. Depuis l’arrivée à la Maison-Blanche de l’administration Biden, plus intransigeante vis-à-vis de la politique d’Ankara, la Turquie avait cherché à renouer avec l’État hébreu, notamment dans le but de s’attirer les faveurs de Washington et de briser son isolement diplomatique dans la région.”
Pour le Times of Israel, Erdogan a aussi “probablement cherché à dégeler les relations avec Israël pour réduire l’isolement […] économique croissant de la Turquie”. Le média israélien rappelle que la monnaie turque a chuté ces dernières années, “laissant la Turquie dans la tourmente économique, avec des élections prévues en 2023”.
Erdogan pourrait utiliser cette normalisation “comme un tremplin pour développer un projet de gazoduc” israélo-turc, rappelle aussi le Times of Israel. Israël pourrait ainsi acheminer du gaz naturel directement vers la Turquie dans le but de réduire la dépendance de cette dernière vis-à-vis du gaz russe”.
La Turquie, “premier pays à majorité musulmane à reconnaître l’État hébreu”
“Historiquement”, note L’Orient-Le Jour, “les liens qu’entretiennent Tel-Aviv et Ankara sont sensiblement meilleurs qu’avec les capitales arabes. La Turquie est le premier pays à majorité musulmane à reconnaître l’État hébreu, peu après sa création, dès 1949”, rappelle le quotidien libanais.
Mais en 2010, les relations se brouillent après l’affaire du navire turc Mavi Marmara. Les forces israéliennes avaient à l’époque lancé un assaut meurtrier contre ce bateau, qui tentait d’acheminer de l’aide à Gaza, enclave palestinienne sous blocus israélien, rappelle le Jerusalem Post. En mai 2018, après la mort d’une cinquantaine de Palestiniens tués par l’armée israélienne à Gaza, la Turquie avait rappelé son ambassadeur en Israël et renvoyé l’ambassadeur israélien. Israël avait riposté en renvoyant le consul général turc à Jérusalem.
Bien que la Turquie ait normalisé ses relations avec l’État hébreu mercredi, elle a dans le même temps souligné sa volonté de “continuer à défendre” les Palestiniens. Certaines “personnalités politiques israéliennes craignent que de nouvelles volte-face de la part du dirigeant turc, notamment concernant la question palestinienne, ne conduisent à une nouvelle brouille juste après le retour des ambassadeurs”, remarque le quotidien israélien Ha’Aretz. “L’une des principales exigences d’Israël avant de rétablir ses relations avec Ankara était que la Turquie se mette à cibler plus activement les activités du Hamas en Turquie”, note le journal de gauche.
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