Éditorial de la Nouvelle Expression : Ma plume, ma santé… la marche du pays
La Nouvelle Expression – Je reprends ma plume (pour mes modestes contributions), après quelques temps d’absence… temps de latence ou d’hibernation ? Rien de tout cela, Camara Seydi Moussa était malade. Une maladie bizarroïde.
Et perdu entre les dermatologues de Nouakchott, Bamako et, depuis quelques mois, de Dakar. Victime d’une allergie de je ne sais quoi. Une allergie qui énerve mes pores sudoripares. Car je ne supporte plus la chaleur ni ne peux porter un quelconque habit. Difficile, non ? De bilan médical en consultation… rien. Les toubibs n’y ont vu que du feu. Car le patient que je suis, après quelques temps de répit, recommence à souffrir.
Alors pour mes soins je suis retourné à Dakar. Sur le chemin de ce rendez-vous médical, contrairement aux autres par le passé, j’ai fait un agréable voyage en compagnie du journaliste et petit frère Babacar Baye N’Diaye de CRIDEM.
C’est ainsi que le petit-frère et célèbre journaliste découvre ma souffrance. La souffrance d’un homme avec peu des moyens, écartelé entre les dermatologues de trois pays. Il a compati et en déduit un peu la cause de la rareté de mes éditos…
Le chemin était exaltant, empreint de l’amour du pays, la Mauritanie. Un pays que nous aimons et que nous jalousons. Mais un pays qui, par sa gouvernance, nous méprise, nous rejette mais surtout se plait et se complait dans la médiocrité, la honte comportementale et de la suffisance béate de l’ignorant. Un ignorant qui ignore qu’il est ignorant et surtout ignore que les gens savent qu’il représente le sommet de l’ignorance.
Au cours du voyage, on a raconté des petites histoires pour égayer l’atmosphère et surtout sortir du complexe des infrastructures que nous traversons…
Cahin-caha, je suis arrivé au point d’intersection qui mène chez mes diatigui. Je dois quitter mon petit-frère Babacar pour chercher un abri, car je n’ai plus les moyens de me loger dans une auberge. Babacar ne comprenait pas comment vais-je faire me frayer un passage dans ce qui ressemble à une petite forêt dakaroise sous un pont qui mène vers le carrefour Thiaxane. Je lui ai assuré que je m’en sortirai. Sur ce, le «Taxi Allô Dakar» me quitta, avec les « Fais attention à toi grand Seydi. Bonne chance ».
Merci Babacar pour ton soutien. A dire vrai, petit-frère, je ne connaissais pas ce pont, ni cet endroit touffu mais j’ai cru aux indications du chauffeur. Car, dit-il, sous le pont, de l’autre côté, il y a un carrefour où je pourrai trouver un taxi pour ma destination. Je dois être hébergé par une famille dans le département de Rufisque au village de Sangalkam avant d’aller sur Dakar lundi pour voir mon médecin.
Sur le chemin, avant cette petite forêt surplombée par un pont, nous avons discuté. La discussion était intéressante, dépassionnée avec un détachement professionnel parfois aigu du sujet. Le petit-frère et moi sommes accueillis par une ville quasi-noyée, grandement paralysée par les eaux de pluie. Mais Dakar a pu se relever après les effets d’une averse d’une intensité sans précédent.
Que serai-il arrivé si cette pluie était tombée sur Nouakchott, notre capitale ? Non. Ce n’est pas le sujet. Parlons de mes médecins. Oui mes médecins. Ils étaient tous bons. Mais seulement chez moi, mon pays, la Mauritanie, les diagnostics de nos vaillants toubibs sont biaisés par les produits servis par nos officines pharmaceutiques. Comme quoi en Mauritanie il y a de très bons médecins qui ploient sous le poids des mauvais médicaments.
Mes propos peuvent être étayés par les cas de ces patientes, victimes de tuberculose osseuse qui, après l’administration du produit servi par le programme mauritanien, n’ont enregistré aucune amélioration. Il a fallu traverser le Fleuve et aller à la petite ville de Richard Toll pour se procurer de la même molécule du programme sénégalais. Alors c’est la ruée vers le Sénégal ou Dakar ; et pourtant, particulièrement pour la tuberculose osseuse, le Sénégal et la Mauritanie reçoivent les mêmes molécules du même programme du richissime américain Bill Gates. Mais les nôtres sont tout simplement mal conservées.
Sacré pays, trituré, saccagé et sucé par des sangsues sans vision ni projet de société ; pauvre pays complètement à terre, complètement perdu. Le secteur de la santé est en perpétuelle admonestation. Le malheureux citoyen mauritanien que nous sommes, continuerons à nous procurer des médicaments sans effet sur les maladies diagnostiquées qui constituent un danger pour notre santé … de véritables poisons. Dans l’histoire récente du pays, le ministre qui a cherché à mettre un peu d’ordre dans le secteur de la pharmacie s’est vu vite remercié. Car jugé nuisibles aux intérêts des intouchables, ces gens qui décident pour nous du prix des denrées alimentaires comme ceux des produits pharmaceutiques !
La faillite. L’Etat mauritanien est réellement en faillite. Embourbé dans l’à-peu-près et l’inefficacité. Sans initiative et ambitions pour ce peuple hagard… les belles intentions du Président Ghazouani ont pour effet sur la vie et l’existence du mauritanien que ce que les gouttes d’eau ont sur un rocher.
Un gouvernement nul. Car Ould Bilal et son équipe n’ont de programme ou d’action que des réactions après les sorties présidentielles. Un Président perdu et pris en otage, dirigeant une horde de ministres qui oublient qu’ils sont là pour exécuter son programme. Monsieur le Président, revisitez vos engagements pour lesquels vous pensez avoir été élu et regardez l’action de votre gouvernement. Le gouvernement à qui vous avez donné la charge de les exécuter. Difficile de ne pas croire que beaucoup de ces hommes et femmes travaillent contre vous ou ne savent pas pourquoi vous leur avez confié ces tâches. Sur ce gouvernement, je viendrais.
… Alors ma santé : je considère que ce n’est pas le médecin dakarois qui m’a soigné mais que c’est plutôt les produits pharmaceutiques distribués et contrôlés par les hommes et femmes en charge de la santé des Sénégalais qui m’ont soigné. Je suis comme les victimes de la tuberculose qui quittent la Mauritanie pour payer les médicaments dans la petite ville de Richard Toll sachant que ces médicaments sont les mêmes que les nôtres convoyés dans le même bateau venant des Etats-Unis.
Alors, pourquoi les nôtres sont sans effet sur les patients jusqu’à ce que les médecins demandent à ces derniers de traverser le Fleuve pour se procurer des produits qu’on offre gratuitement à Nouakchott ? Pauvre de nous !!
Pour ma petite expérience, je dis chapeau aux médecins mauritaniens qui ne sont malheureusement pas soutenus dans la chaine sur laquelle repose le secteur de la santé en Mauritanie. En fait, quel est le secteur qui marche bien dans ce pays ? Quel secteur est en mesure de soulager les difficultés quotidiennes des populations ? J’en cherche…
Tous mes remerciements aux amis qui m’ont soutenu durant les plus difficiles moments de cette épreuve. Merci.
Camara Seydi Moussa