OAPI : le poste de Directeur Général Adjoint doit revenir à la Mauritanie

De prime abord, il est important de souligner que la Propriété Intellectuelle désigne les créations de l’esprit, à savoir : les inventions, les œuvres littéraires et artistiques, et les symboles, noms, images et dessins et modèles utilisés dans le commerce.

La propriété intellectuelle revêt de nos jours une importance considérable en raison du rôle qu’elle joue dans le développement des activités économiques en général et industrielles en particulier.

La protection des Droits de la Propriété Intellectuelle (DPI) encourage les entreprises à innover, favorise la croissance de l’économie et permet ainsi de créer et de préserver des emplois.

Aujourd’hui, les DPI sont vitaux pour les Petites et Moyennes Entreprises (PME), puisqu’ils protègent leurs investissements dans de nouveaux produits et services, les aidant ainsi à obtenir des financements tout en favorisant une concurrence loyale.

Membre fondateur, la Mauritanie est sous représentée…

Lors de sa 8ème session extraordinaire tenue, le 13 mai courant, à Ouagadougou (Burkina Faso), le Conseil d’Administration l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI) a révoqué le Directeur Général Adjoint (DGA), et a autorisé le lancement de la procédure de recrutement d’un nouveau DGA.

La vacance de poste du Directeur Général Adjoint est une opportunité pour la Mauritanie, membre fondateur de cette institution régionale, et qui est sous représentée puisqu’elle ne compte qu’un seul cadre à l’OAPI, depuis 2016.

Aujourd’hui, il revient à la tutelle, à travers le Ministre du Commerce, de l’Industrie et du Tourisme ; afin de faire écho au discours catalyseur du Président de la République, SEM Mohamed Cheikh Al Ghazouani, sur le rôle de l’Administration ; de prendre les mesures qui s’imposent pour redorer le blason de notre pays au sein de l’OAPI.

Dans ce cadre, le Ministre de la santé a été réellement bien inspiré en rappelant récemment au Directeur de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) l’absence de cadres mauritaniens dans cette institution internationale.

Ce constat amer du manque cruel des mauritaniens au sein des organisations régionales et internationales n’est pas un hasard mais la conséquence directe du laxisme ; et je franchirai allègrement le pas pour dire de l’égoïsme de ceux qui sont censés être nos ambassadeurs dans ces enceintes.

Membre fondateur de l’OAPI, la Mauritanie ne compte qu’un seul cadre au sein de cette institution qui regroupe actuellement 17 États membres à savoir : Le Bénin, le Burkina-Faso, le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Guinée, la Guinée Bissau, la Guinée Équatoriale, les Îles Comores, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, le Tchad et le Togo.

Pour rappel, la 56ème session ordinaire du conseil d’administration de l’OAPI, tenue à Nouakchott, le 7 décembre 2016, a été marquée par la nomination d’un nouveau bureau, composé d’un Directeur Général, d’un DGA et d’un Contrôleur financier.

Le poste du Directeur Général revenant à l’Afrique de l’Ouest, la Mauritanie, contre toute attente, n’avait pas présenté de candidat si bien que dans la short list, il y avait un ivoirien et deux sénégalais, dont le Contrôleur financier sénégalais sortant.

C’est finalement la Côte d’Ivoire qui a vu un de ses hauts cadres, en la personne de M. Denis BOHOUSSOU, désigné à la tête de cette institution régionale. Le poste de Contrôleur financier est revenu de nouveau, à tout seigneur tout honneur, au Sénégal ; avec la reconduction du DGA pour la Centre Afrique.

La Mauritanie, qui n’avait pas affiché la moindre velléité de bénéficier d’un poste de responsabilité, n’a obtenu que dalle. Cet impair n’a pas échappé à la sagacité de certains observateurs de l’époque qui ont dénoncé l’incompétence de ceux qui sont en charge la Propriété industrielle.

Aujourd’hui, quasiment tous les Etats membres de l’OAPI sont représentés par deux cadres, parfois même trois, sauf la Mauritanie qui demeure le parent pauvre, compte tenu de l’apathie et de l’immobilisme de la tutelle.

Il n’est pas fortuit de souligner que, dans chaque Etat membre, une Structure Nationale de Liaison (SNL) qui relève, généralement, du ministère en charge de l’industrie ; joue un rôle de relai entre les utilisateurs nationaux et la Direction Générale de l’OAPI dont le siège se trouve à Yaoundé, au Cameroun.

Dans la majorité des Etats membres de l’OAPI, les SNL sont logées dans des Centres de Documentation de la Propriété Industrielle (CDPI) construits par cette institution régionale, et dédiés à la propriété industrielle ; ce qui rend les SNL beaucoup plus visibles.

L’écrasante majorité des pays membres de l’OAPI (y compris des membres non fondateurs) ont déjà logé leur SNL dans un centre de documentation construit par l’OAPI. En Mauritanie, un Centre de documentation est actuellement en chantier sachant que sa construction a été maintes fois reportée aux calendes grecques car la seule obtention d’un terrain a pris plus d’une décennie à cause de la bureaucratie ambiante dans ce pays.

Cependant, il faudrait noter, qu’à un certain moment, il y’avait bien eu une embellie lorsque l’actuel Directeur du Développement Industriel avait pris les choses en main. En effet, c’est lui qui a été le principal artisan de la création de la Direction de la Propriété Industrielle, et c’est encore lui qui avait réussi à débloquer, en 2020, le dossier de construction du CDPI, bloqué, tenez-vous bien, depuis 2002. Cette direction n’étant plus rattachée à son département depuis décembre 2020, on peut dire qu’en aucun cas, il peut endosser une partie du passif.

Formation : un seul mauritanien sur onze promotions en Master II

En matière de formation, la Mauritanie est encore à la traîne. En effet, sur une onze promotions, un seul ressortissant mauritanien a participé, en 2013, au programme de Master II en propriété intellectuelle offert conjointement par l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), l’OAPI et l’Université Yaoundé II.

Un précieux diplôme de Master II en droit de la propriété intellectuelle rangé paradoxalement, depuis neuf ans, dans un tiroir alors que la Mauritanie est sous représentée au sein de l’OAPI. Situation injuste qui ne peut arriver que lorsque ceux qui sont en charge cette question sont dénués de scrupules et de préjugés moraux. Et c’est visiblement bien le cas chez-nous !

Tous les autres membres de l’OAPI ont déjà formé des douzaines d’auditeurs en matière de Propriété Intellectuelles dont certains sont déjà opérationnels au niveau de la Direction Générale de l’OAPI. La Mauritanie, en neuf ans, ne compte toujours qu’un seul lauréat, ce qui montre un manque cruel d’ambition et d’opportunisme de notre tutelle. Et ce qui est triste est que cela ne semble déranger personne !

En effet, ce programme de formation, soutenu par un financement du fonds fiduciaire du Japonais pour la propriété industrielle pour l’Afrique et les pays les moins avancés, permet à chaque Etat membre de l’OAPI de former une masse critique d’auditeurs.

Membre actif du Réseau de compétences et de partenaires Techniques du FPI/OAPI, je milite avec un groupe de cadres pour la promotion de l’expertise nationale au niveau régional et international.

Nous avons des préjugés favorables à l’endroit du Président Al Ghazouani à qui nous demandons solennellement la mise en place d’une nouvelle approche consistant à identifier l’expertise nationale non exploitée en vue de créer un panel d’experts nationaux mobilisables à tout moment dans leurs domaines de prédilection.

La morale de cet article n’est pas de jeter l’anathème sur quiconque mais de montrer qu’il est grand temps de faire tomber l’énorme monolithe de l’amateurisme pour exploiter rationnellement l’expertise nationale, souvent chèrement acquise. C’est de mettre également l’accent sur la nécessité de s’entourer de garde-fous pour éviter que les carences d’un décideur ne puissent hypothéquer les intérêts de tout un pays. Et surtout de renforcer, par la force du plaidoyer, la présence de nos ressortissants dans les organisations régionales et internationales auxquelles la Mauritanie est partie prenante.

Mohamed Ahmed EL KORY
Économiste
Titulaire d’un Master II en Droit de la Propriété Intellectuelle – OAPI
medahmedd@yahoo.fr

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